Ménopause, même pas peur !

De temps en temps, je fais transcrire pour le blog des épisodes de BCBT Le Podcast qui me paraissent les plus intéressantsà partager ici. Aujourd’hui, on parle ménopause (32e épisode – octobre 2019).

Et oui, ce mot qui tracasse, qui inquiète.
C’est bien dommage parce que, ce qui est sûr, c’est que la ménopause concerne, a concerné ou concernera toutes les femmes. Posez-vous un instant. Demandez-vous ce qu’évoque pour vous ce mot “ménopause”. Du négatif, de l’inquiétude ? Du positif, du soulagement ? Ou alors, un sentiment neutre ?

Bien sûr, si vous avez 25 ans vous vous dites « j’ai bien le temps d’y penser » et vous avez raison ! Vivez dans le présent. Mais je constate que cela préoccupe beaucoup de femmes bien avant l’âge théorique auquel ça devraitarriver. Certaines viennent me voir, à peine vers 40 ans pour perdre du poids en quelque sorte pour « prendre de l’avance » sur la ménopause, pour compenser ce qu’elles croient être une inéluctable prise de
poids à ce moment-là. J’avais un peu évoqué le sujet dans le 15e épisode du podcast sur l’évolution du corps de lafemme au fil des années, et je vais approfondir un peu.

Bien sûr, je ne suis pas endocrinologue, je ne suis pas gynécologue, je ne suis pas du tout une spécialiste de la ménopause et donc je vais principalement évoquer la question du poids, car j’ai observé, vous serez sans doute d’accord, que la peur de la prise de poids est une des inquiétudes qui est très souvent associée à la ménopause. Vous avez sûrement entendu parler de cette prise de poids, peut-être que
vous l’avez constatée chez votre mère, une cousine, une sœur, des amies, des collègues, mais – c’est très important pour moi – ce n’est pas parce que c’est fréquent, ce n’est pas
parce que ça semble être la norme que c’est automatique, physiologique, valable pour toutes.
Je vais donc essayer de clarifier un peu le sujet. Évidemment, je ne serai pas exhaustive. En fait, je voudrais faire la distinction entre trois aspects.

D’abord des aspects du poids et de la silhouette qui sont plutôt liés à votre histoire, votre âge, votre mode de vie. Ensuite, des aspects du poids et de la silhouette qui sont la conséquence d’événements de cette période de la ménopause. Enfin, des aspects du poids et de la silhouette qui sont intrinsèques à la ménopause et la pré-ménopause. En fait, c’est sans doute de la pré-ménopause et de tout ce qu’elle recouvre qu’il conviendrait de parler.

Je voudrais encore dire et redire une chose qui est tellement essentielle pour moi : nous sommes toutes différentes, nous avons toutes notre expérience singulière : donc, ce que vivent ou ont vécu d’autres femmes au moment de la ménopause ne dit rien de ce que vous vivrez vous-même.

D’abord quelques mots sur ce qu’est la ménopause. La ménopause intervient en général autour de 50 ans en moyenne, disons entre 45 et 55 ans. Au sein du vaste univers des hormones (autre épisode de BCBT Le Podcast), la femme possède notamment des hormones, les œstrogènes et la progestérone, qui jouent un rôle dans les caractéristiques de la féminité, dans la fécondité. Ces hormones sont produites par les ovaires, et, à l’approche de la ménopause, de façon irrémédiable, il y a une diminution des follicules ovariens qui sont essentiels à la production d’ovules. Cette baisse va entraîner une diminution progressive de la production d’abord de la progestérone puis des œstrogènes jusqu’à l’arrêt de cette production. Ce processus entraîne l’arrêt de l’ovulation et donc des règles : on considère en général que la ménopause est là quand vous n’avez plus eu de règles pendant une année complète.
Comme ce processus est progressif, les femmes connaissent une période de durée très variable : la pré-ménopause. Et il faut savoir que le fonctionnement des hormones est extrêmement complexe et il est au cœur d’interactions multiples.

Je reviens donc à ces trois aspects que je voudrais évoquer.

D’abord, il y a des aspects qui sont indépendants de la ménopause même si cela ne vous parait pas évident : c’est plutôt des aspects liés à l’âge. Quand vous avancez en âge, il est possible que vous ayez pris un peu de poids au fil du temps. Ca n’est ni
automatique ni généralisé mais c’est fréquent. Et peut-être que c’est votre cas. Vous n’y avez peut-être pas fait attention, parce que vous rentrez toujours dans vos vêtements, parce que vous n’êtes pas scotchée à la balance et tout à coup, parce qu’on vous a dit qu’on prenait du poids à la ménopause, vous réalisez que vous avez grossi. Et puis aussi parce que vous voyez votre corps changer. Mais en rélité, cela a été une évolution lente, pas quelque chose d’instantané, ça n’est pas dû à la ménopause en tant que telle. Ce qui arrive au fil des années, progressivement, c’est une certaine perte musculaire qui a
un impact sur notre métabolisme, notre métabolisme de base, la façon dont notre corps dépense l’énergie qu’on lui donne en mangeant. Ça veut dire que vous n’avez pas besoin de manger à 50 ans autant qu’à 20 ans: donc, si vous avez continué à manger toujours les mêmes quantités, si vous ne les avez pas adaptées en écoutant vos sensations alimentaires, il est probable que vous ayez pris quelques kilos au fil des années. Ces quelques kilos deviennent plus apparents à la ménopause parce qu’ils sont davantage
localisés au niveau du ventre mais en fait souvent, cela avait commencé avant. J’entends beaucoup de patientes me dire que e soudain afflux de gras au niveau de l’abdomen les traumatise car elles n’ont jamais eu de ventre. Il me semble que c’est pour cela que la prise de conscience de quelques kilos en trop est plus nette.

Ensuite, la période où se produit habituellement la ménopause peut s’avérer être un moment compliqué. Pour certaines femmes c’est un peu une sorte de « crise de milieu de vie » : il y a la sensation que le temps passe, peut-être trop vite, l’envie de remettre en question sa vie personnelle ou sa vie professionnelle. La tristesse de voir s’éloigner des enfants adultes. Ou une peur d’être peut-être moins séduisante, moins performante, moins énergique. C’est sûr que le monde qui nous entoure n’est
pas très indulgent pour les cinquantenaires et plus. Tout cela est générateur d’émotions et peut-être ces émotions désagréable conduisent certaines à rechercher un réconfort alimentaire plus fréquemment. Ici, ce n’est pas la ménopause elle-même en tant que mécanisme physiologique qui vous fera prendre du poids mais ce sont tous ces
aspects émotionnels.

Par ailleurs, il y a clairement un risque de prendre du poids non comme une conséquence automatique de la ménopause intrinsèquement, mais comme résultat de tous ses effets pénibles que vous pouvez subir. Parce qu’il existe bien des désagréments classiques qui ont une durée, une intensité très variable selon les femmes : les bouffées de chaleur, donc des sueurs nocturnes, le sentiment d’être plus facilement tendue, agacée, irritable. Ainsi, si vous dormez mal à cause de ces sueurs qui vous envahissent, si cette fatigue vous donne davantage faim, davantage envie de manger pour avoir de l’énergie, pour éviter des coups de barre, vous risquez de manger davantage et donc de prendre un peu de poids. Ou si vous aviez déjà tendance à
grignoter ou manger davantage quand vous êtes stressée, tendue, peut-être qu’effectivement vous allez l’être davantage dans cette période et vous allez vous réfugier un peu plus souvent dans la nourriture, et peut-être encore plus si vous être fatiguée. Cela aussi peut avoir un impact sur votre poids, mais ça n’est pas une fatalité à moyen terme. Il n’y a pas de solution miracle : vous reposer, ne pas laisser la fatigue s’accumuler, être à l’écoute de vos émotions, peut-être diminuer un peu café, alcool, épices, pour voir si ça peut atténuer un peu les bouffées de chaleur. Peut-être qu’il y a des solutions naturelles avec les plantes aussi, que je ne vais pas creuser ici car c’est une approche personnelle.

Enfin, il y a des effets vraiment spécifiques à la pré-ménopause et la ménopause.
D’abord, je l’ai évoqué plus haut, il y a une réalité : le corps change. Les œstrogènes ont plutôt pour effet un stockage des graisses dans le bas du corps, au niveau des cuisses, des fesses, des hanches. Quand leur production baisse puis s’arrête, la graisse va davantage aller se situer dans le haut du corps, au niveau du ventre, un peu comme les hommes. Ça ne veut pas dire que vous prenez beaucoup de poids, mais la répartition dans votre corps change, et je constate, comme je l’ai mentionné, que beaucoup de femmes n’aiment pas ça du tout. Elles ont été habituées à avoir une silhouette conforme aux standards féminins, avec une taille plutôt marquée, et soudain elles voient apparaître ce que certaines appellent « une bouée ». Horreur ! Elles sont très agacées et elles ont du mal à accepter ça. Ceci dit, je le répète, c’est différent pour chaque femme et en partie lié au fait d’avoir commencé à prendre du poids avant.

Je peux vous donner mon exemple. Vraiment, ça n’est qu’un exemple singulier et rien d’autre, mais vous avez sans doute des femmes autour de vous comme ça : je n’ai pas l’impression d’avoir spécialement pris du ventre depuis la ménopause, ou vraiment c’est très minime, et j’ai l’impression plutôt que quand même le gras est toujours plutôt concentré dans le bas du corps. Alors, est-ce que c’est un dérèglement, je ne sais pas, je prends ça comme c’est.

Il y a un deuxième aspect à prendre en compte qui montre la fantastique sophistication du corps humain. Je vous parlais de la diminution des œstrogènes, et bien ils jouent un rôle protecteur notamment dans l’ostéoporose. Il semble que quand la production d’œstrogène par les ovaires s’arrête, le corps estime nécessaire de renforcer un peu ses réserves de graisses ailleurs, car les cellules adipeuses vont pendant une période produire des œstrogènes à la place des ovaires pour maintenir ce rôle protecteur.
Bon, pas indéfiniment. À mon avis, cette possible prise de gras est sans doute minorée si on a déjà une certaine masse graisseuse, ce qui est a priori normal chez les femmes, et elle va peut-être être plus notable si on n’a pas beaucoup de masse grasse, par exemple chez une femme qui se restreint beaucoup.

Ensuite, il y a l’équilibre œstrogène-progestérone. Cet équilibre est propre à chaque femme et son évolution aussi. Il semble qu’une baisse trop rapide de la production de progestérone pourrait créer un excès d’œstrogène. Cet excès aura peut-être plusieurs effets : sur le stockage des graisses, sur votre humeur, peut-être aussi un effet sur la rétention d’eau – qui n’est pas une réelle prise de poids mais qui crée une sensation de gonfler. Malheureusement, cela ne parait pas très usuel de mesurer notre taux de ces hormones. Cela peut se faire mais ça semble varier beaucoup et donc être une mesure pas forcément fiable. Mais on peut quand même, des fois si c’est nécessaire, rééquilibrer les choses en fonction des symptômes qu’on observe et donc retrouver le meilleur équilibre possible entre œstrogène et progestérone, même dans la période où ça diminue.

Récapitulons. Si vous n’avez pas pris de poids au fil des années, si vous arrivez à gérer les désagréments de la pré-ménopause sans manger en surplus, si la baisse de production de vos hormones se fait tranquillement, vous allez peut-être observer une légère évolution de votre morphologie mais pas spectaculaire.

Si, en revanche, vous voyez votre silhouette changer significativement et que ça vous perturbe, je suggère de vous occuper plutôt des causes que l’on a évoquées, des
causes réelles, et pas nécessairement incriminer un effet automatique de la ménopause.

Dans tous les cas, essayez d’avoir une alimentation variée, adaptée à vos besoins, d’être attentive aux excès de sel, de sucre, prenez soin de votre sommeil, continuez à bouger, maintenez une activité physique, tout cela ne peut vous faire que du bien.

Ce que je souhaitais avec cet épisode, c’est que vous arrêtiez de vous inquiéter à propos de la ménopause si vous avez 30, 35, 40, 45 ans. Que vous acceptiez que c’est une étape naturelle qui ne se passera pas forcément mal du point de vue du poids, que si vous prenez quelques kilos ce n’est pas forcément grave. Notre corps est une mécanique vraiment complexe, l’important c’est de le connaître, l’écouter, le respecter, en prendre soin.

——–

Actualisation 2023 : soudain on parle beaucoup de la ménopause suite à la publication du livre de deux talentueueses femmes qui ont une bonne visibilité : Elvira Masson et Jennifer Hart-Smith ont publié en novembre Le manuel gourmand de la ménopause, qui a rencontré un large écho dans les médias et sur les réseaux sociaux. L’éditeur Le Seuil a eu la gentillesse de m’envoyer un exemplaire (merci ma chère Fleur Trokenbrock !); Le livre est très appétissant, dans la lignée du précédent livre d’Elvira Masson, Dans ma cuisine, que j’aime beaucoup. Même si les autrices, et en particulier Jennifer Hart-Smith, mettent l’accent sur les bénéfices nutritionnels des recettes spécifiquement pour la ménopause, elles sont vraiment sympathiques pour toute le monde (heureusement d’ailleurs si on doit manger en famille !). J’en ai réalisé 3 excellentes.

2 réponses
  1. Delphine
    Delphine dit :

    Merci beaucoup d’aborder ce thème qui m’a semblé tabou pendant si longtemps.
    Je n’ai que 38 ans, et jamais je n’ai entendu mes tantes ou ma mère parler de leur ménopause, je suis donc ravie de constater que ce sujet s’aborde de plus en plus.
    Personnellement, les modifications corporelles que vous décrivez, je les expérimente depuis que j’ai commencé à prendre la pilule il y a 2 ans (pour des raisons de santé) et plus que le fait de prendre du poids en tant que tel, ce que je trouve perturbant c’est de voir le corps qui change, de sentir des zones devenir plus adipeuses, des zones de peau qui commencent à être en contact (plus que le fait de ne plus rentrer dans des habits que j ai portés durant 15 ans).
    Moi qui ai tjs été longiligne, je remarque bien que mon cerveau a du mal à s’habituer à ces changements brusques de mon corps et de sa « texture ».
    C’est pourquoi je trouve très positif qu’on en parle de plus en plus ouvertement, afin de mieux comprendre les mécanismes en jeu.

    Répondre
    • Ariane Grumbach
      Ariane Grumbach dit :

      @Delphine bonjour, merci beaucoup pour votre partage, il n’est pas simple de voir son corps changer en effet. Que ce soit à la ménopause ou via un moyen contraceptif, il s’agit de l’impact d’hormones internes ou absorbées et le sujet est très complexe. Peut-être, si cela vous dit, une activité sportive qui vous plait pourrait vous j’aider à mieux accepter cette évolution ?

      Répondre

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