Les dix ans d’Omnivore, de la passion, du partage et plein d’autres choses

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Ariane Grumbach - L'art de manger

Lundi et mardi, j’ai passé une bonne partie de ma journée au salon Omnivore qui fêtait ses 10 ans. Pour ma part, c’était la quatrième année que je m’y rendais et à chaque fois, j’en ressors enrichie, enchantée, emballée.

Le magazine Télérama, partenaire d’Omnivore, a partagé dès hier ses impressions, autour de quelques mots-repères. Je n’ai pas vraiment assisté au même salon, car il faut malheureusement faire des choix, parmi la richesse d’événements proposés, et je me suis principalement concentrée sur la scène Artisan, animée avec passion et pertinence par le journaliste Stéphane Méjanès.

J’ai moi aussi regroupé quelques impressions (non exhaustives) autour de mots-clés, en me fixant la contrainte supplémentaire qu’ils commencent tous par P.

Pain

Quand je souhaite assister à ce type d’événement, j’ai besoin de connaître les dates longtemps à l’avance, afin de les bloquer dans mon agenda. Ce fut le cas, au-delà du nécessaire, cette fois-ci, car Thierry Delabre (photo), faiseur de pain de moins en moins clandestin (il fait du pain avec un énorme investissement et de la persévérance depuis 12 ans chez lui), avait prévenu ses amis Facebook depuis longtemps de sa participation. Le pain est pour moi une passion personnelle et professionnelle et j’ai beaucoup à écrire dessus mais plus j’accumule d’idées et de réflexions, plus cela se complique et moins j’écris ! Alors, en attendant, j’ai eu le bonheur d’écouter Thierry Delabre raconter avec beaucoup d’émotion sa plongée dans l’univers du pain, tout ce qu’il lui donne et tout ce qu’il reçoit en retour. On a eu le plaisir de goûter son pain et sa focaccia. Et je me régale par petites bouchées du nouveau Foodbook Omnivore dont le dossier principal est consacré au pain, avec de beaux articles, une BD sur un séjour chez Roland Feuillas (dessin de Claire Braud ci-dessous) à Cucugnan un peu semblable au mien, les adresses des meilleures boulangeries (en toute subjectivité non justifiée), …

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Passion

Il est clair que c’est une passion profonde qui anime les artisans présents, très probablement la crème de la crème de leur domaine. Passion qui n’était pas forcément là au départ, avoue Gilles Vérot, qui a plutôt fait ce choix par obligation familiale, mais qu’il a découverte en route. Passion dévorante et guérisseuse de Thierry Delabre, dont il semble proche de faire une activité à temps plein, comme fournisseur de pain d’exception pour restaurateurs. Passion inquiète d’Alain Rey pour ses abeilles menacées ou de l’ostréiculteur Ismaël Drissi-Bakhkhat face à l’omniprésence des huîtres triploïdes. Passion active d’Hervé Mons pour défendre le vrai bon fromage contre ses ersatz aseptisés ou de Thomas Lehoux, de la Brûlerie de Belleville pour promouvoir le bon café face à la déferlante de boissons horribles qui portent le même nom, tous les deux en sensibilisant et valorisant le travail des producteurs qui les « alimentent ». 

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(de gauche à droite et de haut en bas, Jean-Marie Guilbault, Thomas Lehoux, Alain Rey et Eric Guérin, Ismaël Drissi-Bakhkhat et l’un de ses « maîtres », Gilles Vérot, Hervé Mons)

Parcours

Il était amusant de constater que, à côté d’artisans qui sont dans le métier « de père en fils » comme le charcutier Gilles Vérot (3eme génération, maison ouverte en 1930 à St Etienne) ou Hervé Mons, fromager comme ses parents (les deux ayant amené leur métier bien au-delà de la génération précédente), une bonne part des intervenants étaient des hommes (tiens, peu de femmes artisanes ? – une seule présente dimanche) aux parcours atypiques. Alain Rey est apiculteur depuis 20 ans après d’autres vies. Emmanuel Chavassieux a eu des vies multiples également (légionnaire, photographe, coutelier). Thierry Delabre, professionnel de la communication et du web devenu boulanger plus vraiment amateur. Signe que la nourriture est un essentiel vers lequel beaucoup convergent (moi aussi ;-)).

Partage

La scène Artisan , c’est le lieu de découvrir, écouter, échanger avec des artisans de haute volée. Et c’est aussi le bonheur de goûter leurs produits. Car ils ont à coeur de partager ce qu’ils mettent tant de soin à produire. Ainsi, ces deux jours, sans l’avoir vraiment prévu, je n’ai pas eu besoin de me mettre en quête d’un déjeuner car j’ai été largement rassasiée par les dégustations proposées à chaque fois. Fabuleuses huîtres anglaises « élevées » par Ismaël Drissi-Bakhkhat, fromages délicatement préparés par Hervé Mons (St Nectaire et Brie aux truffes), étonnants et délicieux chocolats, « apéricube » et gâteau nantais aux miels des Ruchers du Pays blanc de l’apiculteur Alain Rey, merveilleux pâté en croûte et fromage de tête de Gilles Vérot,crème au citron toute douce de Jean-Marie Guilbault.

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Provenance et perfectionnisme

Ces artisans ont une exigence extrême pour porter leurs produits à leur meilleur niveau. Jean-Marie Guilbault, confiturier, a une quête sans relâche de la meilleure qualité de fruits et rappelle avec force qu’on ne fera du bon qu’avec de très bons ingrédients de départ. Il a aussi mis au point la recette la plus adaptée pour garder au maximum le goût et la couleur du fruit. Tout est précis, qu’il s’agisse du taux de sucre ou du rôle des bassines en cuivre.  De la même façon, Gilles Vérot a pris conscience il y a quinze ans qu’il ne suffisait à rien d’avoir de bonnes recettes transmises familialement pour faire de bonnes charcuteries mais qu’il fallait aussi impérativement de très bons cochons. Il s’est mis en quête d’animaux de haute qualité qu’il a trouvés dans le Perche. Et quand il s’installe aux Etats-Unis, pas question d’importer des cochons, il cherche les meilleurs sur place et les trouve dans de petits élevages du Missouri et du New Jersey. Thierry Delabre, lui, refait sans cesse de nouveaux essais pour parvenir à un pain qui le satisfasse. Ismaël

Pâtissiers qui n’en sont pas tout à fait ?

J’ai malheureusement passé peu de temps du côté de la Scène Sucré mais j’y ai vu Giovanni Passerini, le chef du restaurant Rino, fermé et en quête d’une nouvelle adresse, ainsi que (partiellement) Yann Couvreur, le talentueux pâtissier de l’hôtel Prince de Galles. On parle souvent de la différence profonde de métier entre cuisiniers et pâtissiers, de la précision requise par ces derniers. Giovanni Passerini a bien sûr rappelé qu’il n’était pas pâtissier. Toutefois il fait des desserts qui sont fort appréciés en travaillant de façon empirique. Mais il les traite comme des sortes d’entrées sucrées, en réfléchissant aux accords de goûts, de textures, au visuel dans l’assiette. C’est important pour lui en tant que chef car il estime que les deux extrémités du repas doivent être fortes. Yann Couvreur (photo, avec Marie-Laure Fréchet) a beau, lui, être pâtissier, il n’en revendique pas moins d’oublier un peu (pas trop quand même !) la précision pour l’intuition (par exemple dans l’arrosage d’une pomme au four comme on arroserait un rôti en se fiant à ce que l’on observe) et l’émotion. Et il avoue assaisonner ses desserts comme des plats, utiliser très souvent du sel, de la cardamome… Une bonne nouvelle pour ceux qui ont peur de la pâtisserie ?

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Pétillance

Un des plaisirs d’Omnivore, c’est que Badoit* est partenaire privilégié de l’événement. L’entreprise finance une Bourse de la création pour soutenir un projet de restauration, offre gentiment à boire sur leur stand, défend la gastronomie par une campagne de communication. Et aussi, elle met à disposition en permanence des distributeurs de bouteilles de Badoit 50 cl gratuites. De quoi ne pas mourir de soif, ce qui est trop souvent le cas dans les colloques, conférences… si on ne s’est pas équipé au préalable. Badoit, c’est aussi un partenariat avec le chef Thierry Marx qui est venu expliquer le rôle de l’eau dans sa cuisine. Il a ainsi insisté sur le fait que la Badoit, grâce à son bicarbonate, permet une cuisson beaucoup plus rapide des légumes mais aussi des viandes. Difficile pourtant de se décider à l’utiliser chez soi, vu le prix, plutôt qu’une pincée de bicarbonate en poudre ! Mais son discours était destiné à la restauration de bon niveau et il apparaît en effet assez sensé, de façon plus large, de prêter un peu d’attention à la qualité de l’eau dans laquelle on cuit des mets d’exception…

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Bref, deux jours riches de rencontres, de réflexion, de gourmandise.

Si vous voulez revoir les épisodes précédents :

2014 et aussi des zooms artisans : Olivier Durand, Laurent Duboisles Bachès

2013

2012

 *Pass obtenu cette année grâce à Badoit, merci à eux !

2 réponses
  1. Ariane
    Ariane dit :

    @Brigitte ravie que cela t’intéresse, pour ma part j’ai à chaque fois pu bénéficier d’un billet gagné ou offert… Il y a beaucoup de propositions de pass à gagner notamment sur le blogs culinaires, tu pourras peut-être tenter ta chance l’année prochaine ?

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