Photographier ce qu’on mange : pour ou contre ?

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Ariane Grumbach - L'art de manger

C’est amusant, depuis quelques mois, la foodosphère se passionne pour ce sujet, des chefs interdisent les photos de leurs plats alors que les applis et sites pour montrer ces photos se sont multipliés depuis quelques années. Et vous avez peut-être déjà vu lors de vos récents repas au restaurant quelque individu dégainer son téléphone pour prendre une photo de son assiette…

Alors, j’apporte mon modeste témoignage au débat…

Jusqu’à la création de mon blog, même si j’ai toujours adoré manger, je crois que les occasions de photographier des plats étaient fort rares, peut-être des occasions exceptionnelles, et encore (pas de souvenir de photos prises lors de repas d’anniversaires, de mariages…), ou sans doute des repas pris au Japon car d’une grande beauté esthétique et faisant partie des souvenirs du voyage.

En 2008 j’ai lancé mon blog. Puis en 2009, j’y ai mis en place, pour un an, des « plaisirs gourmands quotidiens« . Pour inciter les personnes à se faire plaisir en mangeant le plus souvent possible, je parlais chaque jour d’un plaisir gourmand que j’avais eu. Du coup, pour illustrer les billets, je me suis mise, du jour au lendemain (la première photo d’ailleurs est d’ailleurs bien tristounette) à photographier tout ce que je mangeais (ou presque !), que ce soit des plats maison ou pris à l’extérieur. Car, chaque soir, je faisais le bilan pour parler le lendemain matin de ce que j’avais mangé de meilleur. Il m’était apparu évident que mes écrits n’avaient pas un pouvoir évocateur suffisant pour se passer de photos ! Au bout d’un an, j’ai arrêté ce systématisme quotidien mais j’ai continué à parler souvent de ce que je mange, que ce soit à l’extérieur ou à la maison.

Je ne suis en aucun cas une grande photographe. Mais je n’utilise pas non plus instagram, je ne sais pas vraiment ce que c’est. Je n’ai pas d’iphone. Je prends toujours mes photos avec mon petit appareil photo automatique : je fais une vague mise au point, je cadre vite (c’est ma façon de photographier en général…) et je prends la photo en quelques secondes d’où des photos à faible valeur « artistique » même si elles recueillent parfois des compliments de lecteurs indulgents. Autant dire que le plat, s’il est chaud, n’a absolument pas le temps de refroidir. Ni mes compagnons de repas de s’agacer ou s’impatienter.

J’avoue que je ne demande pas l’autorisation au restaurant mais je ne me suis jamais cachée. Je n’ai jamais eu la moindre remarque d’un restaurant, qu’il soit chic ou modeste.

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Souvenir d’un merveilleux repas aux Bacchanales à Vence

Ces photos, je les utilise uniquement pour mon blog. Très occasionnellement sur twitter pour une raison précise, une envie particulière de partage. Et si aujourd’hui où mes thèmes sont plus divers, je ne parle pas du repas en question, la photo reste uniquement dans ma « collection ». Je ne suis pas inscrite sur les sites de partage de photos de type « food reporter », je n’ai pas le temps ni l’envie de devenir une sorte de guide gastronomique. Et comme je parle (sauf rare exception) de ce que j’ai aimé manger, les photos ne sont pas associées à une critique négative, ce n’est pas mon rôle.

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Chez Saquana, c’est aussi bon que beau…

Je rappelle souvent qu’on mange avec tous ses sens et je trouve finalement que cette petite étape photo, en ce qui me concerne, renforce sans doute l’attention visuelle portée au plat. Avant et après l’avoir photographié, je prends le temps de le regarder. Puis je hume ses parfums. Et ensuite je mange en étant pleinement à ce que je fais.

Quant aux repas maison, j’ai noté que nous étions devenus encore plus attentifs à la présentation. Sans doute aussi l’influence japonaise.

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Monsieur, qui est un esthète, prend soin à préparer une jolie assiette. Donc encore plus de plaisir des yeux avant celui des papilles !

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Alors, bien sûr, cela amuse parfois mes amis totalement étrangers à la sphère alimentaire et je n’ai aucun problème à m’expliquer.

Du coup, je ne vois aucun inconvénient à cette pratique.

Et je trouve qu’il est bien plus dommageable pour l’appréciation du repas de téléphoner, regarder ses mails, twitter ou toute autre activite PENDANT qu’on mange.

Quant à l’agacement de certains chefs, il me semble qu’il peut avoir plusieurs sources :
– la peur d’être copié, l’envie de sauvegarder ses idées créatives ? J’ai du mal à comprendre cette inquiétude car d’une part un chef travaille d’abord sur le goût et d’autre part, il a sans cesse de nouvelles idées. Et un plat n’est quand même pas une oeuvre d’art…
– la crainte de déranger la tranquillité du lieu si se multiplient clics d’appareils et crépitements de flash ?
– l’envie de préserver la surprise des plats pour les futurs clients ? C’est peut-être ce que je comprendrais le mieux car j’aime la part de surprise qui accompagne un repas au restaurant, qu’il s’agisse du menu, du visuel et du goût des plats. 

Et vous, sincèrement, êtes-vous pour ou contre les photos des repas ? Ou cela vous est-il complètement indifférent ?

14 réponses
  1. Karine
    Karine dit :

    Bonjour,
    Intéressant article puisque j’aime autant cuisiner, les repas que la photo… Perso, je ne prends en photo ce que je mange qu’en occasions très précises :
    – Chez moi quand je suis fière de ce que j’ai fait ou pour mon blog de cuisine. Mais je vais pas photographier tous les soirs ce que je prépare à manger. Faut qu’il y est un minimum d’intéret quand même.
    – Dans un resto, c’est assez rare. Je le fais parfois à l’étranger comme « photo de voyage » ou quand la présentation d’un plat est vraiment top (genre brasseries Bocuse à Lyon) mais rarement voir jamais dans les autres restos.
    Sinon j’aime les photos de cuisine, celles aui ont un décor, sont bien prises, une belle présentation… ça donne des idées, ça donne faim et on voit le résultat attendu pour une recette ce qui n’est pas négligeable.
    Voila
    A+
    Karine

  2. Lauriane
    Lauriane dit :

    Bonjour,
    Il me semble que les (certains) chefs n’apprécient pas qu’on photographie leurs assiettes parce que justement comme vous le décrivez si bien, quand on prend ce genre de photo c’est à la va-vite et au final la photo ne rend pas hommage au plat et donc le dessert plus qu’autre chose. Une fois un chef a même préféré refaire l’assiette en voyant que la personne voulait la photographier car au moment de la photo tout avait déjà refroidi et ça se voyait.
    Personnellement j’adore prendre en photo tout ce que je cuisine et ce que je mange au restaurant !

  3. brigitte
    brigitte dit :

    Bonjour Ariane,
    J’ai fait deux sujets sur mon blog à ce sujet (http://www.brigitteathome.com/2012/02/iphonographie-et-gastronomie.html) . En fait pour moi la question principale est de profiter pleinement de la nourriture, et dans mon fonctionnement j’ai du mal à être en mode photo et en mode manger… J’ai vu comment tu photographiais et c’est efficace et rapide. Je le fais aussi en vacances ou dans certains restos, mais je ne pourrais pas du tout le faire dans un trois étoiles cela me gâcherait le plaisir, parce que en plus je prends du temps pour photographier !
    voilà donc je pique parfois les photos aux copines 🙂
    Brigitte
    http://www.brigitteathome.com

  4. Le Kitchen Bloggen
    Le Kitchen Bloggen dit :

    Pendant des années, et bien avant cette discussion sur le net, je prenais des photos des plats pour des fins personnelles. Non, pas pour copier, ni pour partager sur mon blog ou autre, mais pour des raisons professionnelles. Ça n’a jamais était un problème, au contraire, pas mal de cuisiniers faisais pareil. Après, foodreporter, les blogs etc arrivait et la, tout à changé. Dommage et inutile je trouve, je ne sais pas la raison de cette changement. C’est vrai que je n’apprécie pas les photos de mauvaise qualité et je ne vois vraiment pas l’intérêt de les publier, c’est limite irrespectueux pour la personne qui à crée l’assiette, mais ça, c’est un avis personnelle et ce que je trouve pas flatteur comme photo pourrait plaire à quelqu’un d’autre. A qui de juger un bon photo, et qui à le droit de les prendre ou pas?

  5. Douce-Addiction
    Douce-Addiction dit :

    Pour ma part j’ai toujours aimé manger et toujours aimé photographier. Alors faire les deux en même temps m’est très vite venu à l’esprit et ça ne s’est pas arrangé le jour où j’ai décidé de m’orienter professionnellement vers la photographie culinaire et encore moins depuis que j’ai ouvert un blog.
    Je fais partie de la génération Internet, la génération Y comme ils disent, j’ai grandi avec l’ouverture et l’accès à la multitude d’informations que nous offre la toile, j’ai connu l’arrivée des réseaux sociaux à l’âge où on commence à vouloir échanger et entretenir des relations. Je suis inscrite sur Facebook, Twitter, Pinterest, Instagram… et Food Reporter. Et je poste ce qui me semble être intéressant, donc forcément des photos culinaires.
    Je pense qu’il y a un réel engouement pour le monde culinaire, un retour à la cuisine comme un retour aux sources. Maintenant conscients que l’industrie n’est finalement pas une révolution parfaite, on retourne derrière les fourneaux et on est plus sensible à ce qu’il y a dans notre assiette. En plus de tout ça s’ajoute la situation financière actuelle : faire maison est plus sain et plus économique. Et au restaurant ? On veut un rapport qualité/prix. Voilà à mon sens pourquoi la photographie de cuisine revient : il y a celle pour faire saliver, pour donner des idées, et il y a celle pour être rassuré c’est à dire pour savoir ce qu’il nous attend quand on ira dans ce restaurant qu’on ne connait absolument pas et dont on peut être déçus.
    Il y a quelques temps j’ai reçu quelques réflexions un poil agressives quand j’ai sorti mon iPhone au restaurant. « Aimeriez-vous que je vienne photographier votre intérieur sans autorisation ? ». Après explications, la responsable du lieu s’est excusée en me disant qu’elle nous voulait pas qu’on dise du mal de son établissement, et encore moins avec des photos à l’appui. Ce n’était pas mon intention, je ne partage que ce qui me plait, je ne suis pas une critique culinaire. Mais je pense que ce qui effraie, c’est la mauvaise pub.
    Dans un monde virtuel où tout peut être dit par tout le monde et où l’information est relayée à toute vitesse, comment ne pas craindre des critiques négatives abusives ? Avant la critique était faite par des professionnels, aujourd’hui elle est signée de la plume de M. et Mme Tout-Le-Monde.
    Mais même si on craint la critique négative, on est tout de même ravi d’en recevoir des positives. Interdire les photos c’est alors interdire les remarques négatives mais aussi les éloges. Interdire de donner son avis, du coup. Et la liberté, elle est où ?

  6. very easy kitchen
    very easy kitchen dit :

    j’ai pris plusieurs en photo des repas dans des 3 étoiles et je n’ai jamais eu de réflexions de la part des maîtres d’hotel. Ils sont toujours amusés surtout si c’est fait discrètement. je ne fais des photos que si la lumière naturelle est suffisante. jamais au flash. Les chefs ont surtout peur que les photos pourries nuissent à leur image. Pour ma part, je pense que c’est une bonne idée pour les chefs de prendre en photo leurs plats et de les présenter sur leur site internet pour que l’on puisse garder un souvenir de ce que l’on a mangé. On garde bien en souvenir le menu et on aurait la possibilité d’avoir aussi en souvenir les plats en photos; cela éviterait bien d’avoir des mauvaises images.

  7. Virginie
    Virginie dit :

    Je partage entièrement le point de vue et la pratique d’Ariane.
    Je ne suis pas du tout photographe mais depuis que j’ai mon blog je ressens la nécessité de photographier afin d’illustrer mes billets. Quand je suis au restaurant, j’utilise mon mobile, assez rapidement, pour ne pas incommoder et pour éviter que mon plat ne refroidisse, ce dont j’ai horreur.
    Ceci dit je peux comprendre que sortir un matériel plus encombrant, voire une tablette, devienne un peu lourdingue et peut-être irritant.
    Aujourd’hui je regrette de ne pas avoir photographié des assiettes fabuleuses (par exemple le -mon- « gargouillou » chez Michel Bras, le « dessert du voyageur » de mon premier diner chez Roellinger, il y a près de 20 ans). Cela m’aurait aidé à mémoriser, et peut-être donné un autre souvenir d’un plat ; peut-être même l’ai je enjolivé ?
    La proposition de poster par le cuisinier des photos -utilisables- sur son site est intéressante. Ceci étant, cela est difficilement faisable pour les chefs qui font une cuisine au jour le jour.
    Alors je suis pour.

  8. Sylvie Art de Vivre
    Sylvie Art de Vivre dit :

    Au delà des blogs je pense qu’en parallèle la démocratisation de la photo avec le numérique qui devient de plus en plus abordable permet de faire beaucoup beaucoup plus de photos dans tous les domaines et y compris ce qui nous occupe le plus souvent et régulièrement en dehors de dormir : manger !!!!!

  9. Cicciotella
    Cicciotella dit :

    Je comprends les craintes des chefs et je pense qu’un artiste exposant dans une galerie aurait les mêmes craintes (j’ai retrouvé un tableau quasi-identique à celui de ma mère dans une galerie).
    Je pense qu’une personne qui n’a pas de mauvaises intentions et qui reste discret, et se rappelle que son plat n’est pas un prétexte à bloguer, twitter ou je ne sais quelle activité triangulaire, mais destiné à entrer en relation avec lui… chaud.

  10. gaelle
    gaelle dit :

    je partage complètement ton point de vue ariane et j’ai les mêmes pratiques que toi. Je photographie beaucoup a la maison pour mon blog. Au resto, je photographie mais de manière rapide et sans flash pour ne déranger personne. Je publie les photos de plats de restos uniquement si j’ai aimé et si les photos sont d’assez bonne qualité. Dans les restos étoilés, je demande l’autorisation avant de faire des photos, on ne m’a jamais dit non pour le moment.

  11. Antoine
    Antoine dit :

    Ah les droits d’auteur ! Même les chefs s’y mettent en effet. A quand les recettes en creative commons. Personnellement, je photographie beaucoup au resto, mais au smartphone, sans flash et de manière la plus discrète possible; et c’est plus pour me souvenir que pour m’inspirer.

  12. Ariane
    Ariane dit :

    Merci beaucoup à tous pour vos commentaires et témoignages.
    @Karine en effet c’est mieux si c’est vraiment beau mais cela demande une préparation peu compatible avec le restaurant et qui n’est pas à la portée d’une amateur comme moi !
    @Lauriane vu la vitesse à laquelle je prends la photo, peu de risque de refroidissement mais en effet, surtout quand l’éclairage est minime, le plat n’est pas forcément mis en valeur. Mais le chef a le plaisir que je parle de lui et en général, cela semble lui aller, quand j’ai des échos…
    @Brigitte merci pour les liens, la photo chez moi n’est jamais au détriment du plaisir de manger, si important pour moi car quelque soit le niveau du restaurant cela reste rapide et cela ne déconcentre pas du tout pour ce qui suit…
    @Le Kitchen Blogger en effet, soyons respectueux et quand mes photos sont vraiment mauvaises, je préfère éviter de les publier eou je m’en excuse clairement
    @Douce-addiction je suis aussi plutôt du côté de la liberté mais pas de faire ou montrer n’importe quoi si possible, question de respect mais du coup, en effet, qui juge ? Les niveaux d’exigence sont bien divers…
    @very easy kitchen en effet, pourquoi pas des photos par les chefs, cf un nouvel appareil vu sur le site Atabula mais cela ne remplacera peut-être pas ses propres souvenirs…
    @Virginie merci pour ce retour de belle expérience
    @Sylvie sans doute !
    @Cicciotella je vous promets que je ne mange jamais froid à cause d’une photo ! Et je doute que quiconque sache reproduire une recette de chef à la seule vue d’une photo…
    @gaelle ravie que l’on soit en phase. Pour ma part, mon comportement est le même, quel que soit le type de restaurant
    @Antoine en effet se souvenir et partager parfois mais jamais reproduire !

  13. triles
    triles dit :

    Bonjour,
    Je suis serveuse dans un restaurant à Paris (cuisine asiatique/exotique encore peu répandue en France). Les clients ont souvent du mal à retenir le nom des plats. Certains d’entre eux préfèrent prendre des photos et me les montrent lors de la commande. Ca va plus vite, pratique !

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