Les pâtisseries japonaises, cela vous dit ?

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Ariane Grumbach - L'art de manger

Il y a quelques semaines, j’ai été contactée par une société de production travaillant pour le magazine 100% Mag de M6 afin de participer à un reportage sur la pâtisserie japonaise. J’ai pour coutume en général de refuser ce type de demande car il s’agit le plus souvent d’intervenir sur un aliment ou une pratique sous un angle très classico-diététique qui ne me ravit pas et j’ai largement mieux à faire pour m’occuper… Pourquoi ai-je accepté cette fois ? Une baisse d’esprit critique liée à ma passion du Japon ? L’idée que je serai plus forte qu’eux pour faire passer « mes » messages ? Illusion !

Après un rendez-vous replanifié deux fois, on a fini par tourner. Et évidemment, l’objectif central était de me faire dire que les pâtisseries japonaises étaient plus light que les françaises (au hasard, un mille-feuilles..) et donc bien adaptées aux personnes qui surveillent leur poids. Pas vraiment ma tasse de thé ! Que cela soit vrai ou pas n’est pour moi pas la question. Et même si j’ai lutté contre cette idée dans mes réponses, vous connaissez les capacités du montage… (je n’ai en fait aucune idée du résultat final, c’était très urgent et depuis, plus de nouvelles, peut-être cela va-t-il passer à la trappe…?)

Alors, pour vous dire vraiment ce que je pense, rien ne vaut un billet de blog (désolée pour le préambule un peu long…).

Une chose est sûre, les pâtisseries japonaises (je me limiterai ici aux wagashi) sont très différentes des pâtisseries françaises.

D’abord, elles ont en général une symbolique liée à la saison. Chez nous, on utilise couramment des fruits de saison mais on ne cherche pas spécialement à exprimer des caractéristiques ou des impressions liées à la saison. Et la plupart des gâteaux sont présents toute l’année.

Elles sont par ailleurs petites, d’une taille très inférieure à la plupart de nos pâtisseries. Mais n’est-ce pas suffisant pour se faire largement plaisir avec une « note sucrée » ? Est-ce qu’il ne vous arrive pas de « caler » quand vous mangez un gâteau et de vous dire que vous pourriez vous arrêter ?

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La composition de ces gâteaux est très différente. Alors que nos pâtisseries contiennent en général de la farine, des oeufs, du sucre, souvent du beurre ou une autre matière grasse, éventuellement du lait, les wagashi sont composés majoritairement de pâte de haricot rouge, voire de pâte de haricot blanc, de sucre (du sucre wasanbon, sucre non raffiné très fin), parfois de farine de riz. Il n’y a pas de matière grasse dans le wagashi : cela rejoint une caractéristique de la cuisine japonaise, peu grasse et essentiellement végétale et maritime (du fait de la géographie). En revanche, le wagashi a une saveur très sucrée car il est là pour adoucir l’amertume du thé vert.

En terme de texture, le wagashi apparaît assez pâteux car cela caractérise la pâte de azuki (haricot rouge). Cela ne plait pas toujours aux Français qui vont peut-être préférer du croquant, du croustillant, du moelleux, du crémeux ou un mélange de ces textures.

Les parfums sont subtils, peu affirmés, on est loin de nos riches arômes de chocolat, café, praliné,
cannelle, noix de coco, fruits divers, …

Leur moment de dégustation est particulier : pas à la fin du repas mais à tout moment de la journée (plutôt l’après-midi) avec un thé, souvent un matcha.

Ce qui m’agace dans le type d’approche voulue par le reportage, c’est qu’on veuille manger des pâtisseries japonaises pour leur aspect calorique sans forcément se faire plaisir. Est-ce que ce type de considérations doit guider notre choix de pâtisserie ? Non !!! Je suis contre l’idée qu’on se mette à manger des wagashi parce que ce serait « light » ! Bien sûr qu’on peut être curieux(se) de les découvrir, qu’on peut apprécier leur esthétique voire même leur goût. Mais c’est très particulier et il ne faut surtout pas se forcer. Pour ma part, peu fan de la texture pâteuse-farineuse en général, j’ai mis un certain temps à les apprécier. Cela me fait très plaisir d’en manger maintenant mais si vous me donnez le choix entre un wagashi et un éclair au café, c’est très probablement ce dernier qui aura ma préférence !

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En revanche, sans forcément en manger, si on préfère en rester aux pâtisseries d’ici, on pourrait quand même en tirer un peu d’inspiration, par exemple : 
– la taille : pourquoi ne pas proposer des gâteaux plus petits (en adaptant le prix bien sûr !) ?
– l’esthétique,
– le respect des saisons, en étant encore plus attentif à cet aspect du côté des pâtissiers,
– le moment de dégustation, en dehors des repas ou au moins à un moment où l’on a de l’appétit et les papilles disponibles.

Si vous voulez :
– en savoir plus sur les pâtisseries japonaises et les déguster aves les yeux, il y a un joli livre sorti récémment, « Wagashi » de Minori Kai.
– les savourer pour de vrai et que vous habitez Paris, il y a Toraya et son grand classicisme, Walaku et sa douce élégance.

Conclusion : mangez les pâtisseries qui vous font plaisir, en ayant faim pour mieux les apprécier, en les savourant pour vous faire un grand plaisir gustatif sans forcément une grande quantité.

9 réponses
  1. brigitte
    brigitte dit :

    merci Ariane pour cet éclairage sur les pâtisseries japonaises.
    En ce qui concerne les médias je sais pour les avoir approché professionnellement (édition) et personnellement (au sujet de l’adoption) que malheureusement à 99% les journalistes vous interviewent avec une idée précise de ce qu’ils veulent vous faire dire et ils vous insèrent (quitte à tronquer vote message) dans leur article ou leur reportage en général déjà construit avec un angle très précis, souvent le plus bateau… c’est ballot mais c’est comme ça…
    Pour ça que je ne participe plus à moins de signer un BAT, ce qu’ils n’accordent en général qu’à des gens connus.
    brigitte
    http://www.Brigitteathome.com

  2. Milounette
    Milounette dit :

    Je ne connais pas bien les patisseries japonnaises, rarement proposées dans les restaurants japonais. Ma première expérience fut en Allemagne avec des mochis et j’ai eut toutes les peines du monde à en retrouver en France (j’ai finalement trouvé mon bonheur rue St Anne à Paris). Leur texture est bien particulière et ces gateaux (mais peut-on vraiment parler de gateaux?)sont je trouve lègèrement bourratifs, c’est pourquoi c’est finalement tant mieux s’ils sont petits. Je préfère d’ailleurs les déguster au petit déjeuner ou pour le gouter, ou en conclusion d’un repas léger (salade, soupe), comme la plupart de patisseries, françaises ou autre.
    Concernant la taille des patisseries françaises, je suis tout à fait d’accord mais j’ai souvent remarqué que le prix était inversement proportionnel à la taille: plus le gateau est petit, plus le prix est élevé….

  3. Lylou
    Lylou dit :

    Je me suis mainte fois dit que je devais aller chez Toraya pour goûter ces fameuses pâtisseries japonaises et finalement je ne l’ai jamais fait. Par contre j’ai déjà goûté aux mochis car un de mes collègues avait emmené une boite de pâtisseries japonaises. J’ai beaucoup apprécié leur texture gélatineuse. Tout comme j’apprécie de manger des boules de coco chaudes lorsque je passe devant un traiteur asiatique.Par contre je devais depuis longtemps passer chez Stohrer à la rue montorgueil et aujourd’hui je l’ai fait.J’en suis ressortie avec avec trois pâtisseries que j’ai mangé dés mon arrivée à la maison.Oups je n’ai rien dit ! (Je vous vois bientôt):-O
    Lydie LOUSSALAT

  4. Ariane
    Ariane dit :

    @Milounette les mochi, pas vraiment ce que je préfère côté Japon et côté français, ce serait en effet sympa de faire plus petit mais le prix en proportion !
    @Lylou faites un tour chez Toraya un de ces jours si cela vous dit mais ce n’est pas parce que c’est petit qu’il faut forcément en manger plusieurs 😉

  5. Rose
    Rose dit :

    Je suis vraiment curieuse de pâtisseries japonaises. J’ai acheté des azuki il y a un moment pour me lancer mais je n’ai toujours pas trouvé le temps.
    N’ayant malheureusement jamais pu aller au Japon, j’ai eu la chance de gouter un gâteau ici en Suède, réalisé par une japonaise : un gateau au sésame avec une purée d’azuki au centre. Vraiment très bon. J’ai hâte d’en découvrir plus encore !

  6. Macaronette
    Macaronette dit :

    J’ai lu avec grand plaisir votre billet. Excellent sur la distinction entre pâtisserie à la française et à la japonaise. Je vois que l’on partage l’avis sur les médias et leur méthode pour obtenir ce qu’il souhaite faire passer comme idée.
    Mais au-delà de cela, j’aime beaucoup le ton et l’orientation de ce billet : ce faire plaisir avant tout et ne pas manger juste parce que bien diététiquement et pour le nombre de calorie.
    En restant raisonnable en tout, on peut se faire infiniment plaisir.
    Bonne semaine

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